Devoirs de vigilance

Que peut-on faire pour passer au crible les sociétés en formation ?
Pour les sociétés en formation, il faudra obtenir une copie de la carte d’identité des personnes qui se présentent comme étant les promoteurs de la société (c’est-à-dire les personnes tenues personnellement et solidairement des engagements conclus pour la société en formation jusqu’à ce que cette dernière, une fois constituée, les reprenne à son nom et pour son compte, libérant le(s) promoteur(s) rétroactivement). Il faudra également procéder à des vérifications via des bases de données comme Graydon, Companyweb, Google… pour mieux comprendre le passé en tant qu’entrepreneurs des promoteuirs. Toujours être attentif à l’origine des fonds investis dans une société en formation !
Imaginons que vous ayez un rendez-vous avec un prospect et que vous ne sachiez pas qui est la personne en face de vous. Peut-on légalement demander l’identité de cette personne, alors qu’on n’a pas encore décidé de l’accepter comme client ?
En principe, tant que le client reste un prospect et que ni celui-ci ni le professionnel n’ont décidé s’ils allaient entrer en relation d’affaires, il n’est pas obligatoire de demander la carte d’identité. Toutefois, le professionnel peut demander la carte d’identité du prospect s’il le souhaite. S’il décide finalement de ne pas rentrer en relations d’affaires avec lui, il devra penser à détruire la copie de la carte d’identité du prospect pour des raisons de respect de la protection des données personnelles.
Qui est autorisé à identifier le client en face à face ? Peut-il s’agir d’une personne du cabinet ou faut-il passer par l’AMLCO ?
L’AMLCO devra décrire dans la procédure interne du cabinet qui sera chargé de cette mission. Cela sera le plus souvent la personne qui traite le dossier au sein du cabinet, celui qui rencontre le client qui se chargera de l’identification ‘face-to-face’… Après l’identification du client potentiel par la personne qui traite le dossier, l’AMLCO sera appelé à intervenir en tout cas en cas de personne politiquement exposée. L’AMLCO devra ainsi par exemple analyser si le cabinet accepte de prendre cette personne comme client ou pas en fonction de la politique du cabinet.
Dans le cadre des exonérations d’identification dans le contexte de la législation LAB, est-ce correct que l’exonération d’identification ne viserait plus que les transactions d’un montant inférieur à 10 000 euros?
La loi du 18 septembre 2017 a abrogé la loi du 11 janvier 1993 qui prévoyait les exonérations que vous citez. L’article 21, § 1er, 2°, a) maintient l’exonération d’identification et de vérification de l’identité du client pour les opérations occasionnelles de moins de 10 000 euros. Toujours dans l’optique de l’approche fondée sur les risques, si le client représente un risque élevé (s’il s’agit d’une personne politiquement exposée, par exemple) ou si la transaction demandée semble atypique, une vigilance accrue est toutefois de mise. Il est recommandé dans ce cas de tout de même identifier et vérifier l’identité du client.
Quelles sont désormais les exonérations d’identification possibles dans le cadre de la législation LAB ?Et qu’implique au juste une telle exonération? S’agit-il uniquement d’une exonération d’identification de la société/l’ASBL, de ses administrateurs, de ses bénéficiaires effectifs, etc ou, en d’autres termes, jusqu’où s’étend une telle exonération ?
Indépendamment de ce qui est mentionné ci-dessus, deux exonérations sont prévues dans la loi du 18 septembre 2017 :
  • L’exonération visée à l’article 23, alinéa 2 de la LAB : pas d’obligation d’identifier et de vérifier l’identité des bénéficiaires effectifs du client et du mandataire du client lorsque le client, le mandataire du client ou une société qui contrôle le client ou le mandataire est une société cotée sur un marché réglementé, au sens de la directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE, dans un État membre, ou sur un marché réglementé dans un pays tiers où la société cotée est soumise à des dispositions légales qui sont équivalentes à celles énoncées par ladite directive et qui imposent notamment des obligations de publicité des participations dans la société concernée équivalentes à celles prévues par le droit de l’Union européenne ;
  • L’exonération prévue à l’article 34, § 4 LAB : pas d’obligation d’identifier les caractéristiques du client ni l’objet de la relation d’affaires ou de l’opération occasionnelle lorsque le membre évalue la situation juridique de son client ou exerce sa mission de défense ou de représentation de ce client dans une procédure judiciaire ou concernant une telle procédure, y compris dans le cadre de conseils relatifs à la manière d’engager ou d’éviter une telle procédure. Cette exonération existait initialement pour les avocats et a été étendue à notre profession.
Est-ce qu'une copie des cartes d’identité des responsables suffit pour les ASBL ? Ou faut-il une copie des cartes d’identité de tous les membres du conseil d’administration de l’ASBL? 
En vertu de l’article 4, 27°, c) de la loi du 18 septembre 2017 relative à la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et à la limitation de l’utilisation des espèces (http://www.ejustice.just.fgov.be/eli/loi/2017/09/18/2017013368/justel), tous les membres du conseil d’administration d’une ASBL sont considérés comme étant des bénéficiaires effectifs Plus précisément, sont bénéficiaires effectifs d’une ASBL : 
  • Les personnes qui sont membres du Conseil d’Administration ;
  • Les personnes qui sont habilitées à la représenter ; et
  • Les personnes chargées de la gestion journalière.
Il est dès lors nécessaire d’obtenir un document prouvant l’identité de l’ensemble de ces personnes dans le cadre des obligations de vigilance liées à la prévention du blanchiment. Le type de document nécessaire pour prouver l’identité sera décrit dans le manuel de procédures interne du cabinet et variera en fonction du niveau de risque.
Pour quelles personnes au minimum devons-nous avoir une preuve d’identité dans le dossier LAB pour être en règle au niveau des exigences de la législation LAB ?
Il convient de distinguer les cas suivant lesquels vos clients sont des sociétés de ceux où il s’agit d’ASBL. En effet, les bénéficiaires effectifs ne sont pas les mêmes dans ces deux cas de figure. 


Pour les sociétés, sont considérés comme bénéficiaires effectifs (article 4, 27° a) de la LAB du 18 septembre 2017) : 
  1. La ou les personnes physiques qui possède(nt), directement ou indirectement, un pourcentage suffisant de droits de vote ou une participation suffisante dans le capital de cette société. En principe, la possession par une personne physique de plus de 25 % des droits de vote ou de plus de 25 % des actions de la société est un indice de pourcentage suffisant ;
  2. La ou les personnes physiques qui exerce(nt) le contrôle de cette société par d’autres moyens (exemple : pacte d’actionnaires, droit de nommer les membres du conseil d’administration, droit de veto) ;
  3. Si personne ne peut être identifié en fonction des points 1 et 2 ci-dessus, la ou les personnes physiques qui occupe(nt) la position de dirigeant principal. S’agissant d’une catégorie résiduelle, l’identification d’un tel bénéficiaire effectif doit être dûment documentée et fondée (exemple : démarches entreprises pour l’identification des deux premières catégories, issues des recherches effectuées et qui sont restées vaines).


Pour les a(i)sbl, sont considérés comme bénéficiaire effectifs (article 4, 27°, c) de la LAB du 18 septembre 2017) : 
  1. Les administrateurs ;
  2. Les personnes qui sont habilitées à représenter l’association ;
  3. Les personnes chargées de la gestion journalière de l’a(i)sbl
  4. Les personnes physiques ou, lorsque ces personnes n’ont pas encore été désignées, la catégorie de personnes physiques dans l’intérêt principal desquelles l’a(i)sbl a été constituée ou opère ;
  5. Toute autre personne physique exerçant par d’autres moyens le contrôle en dernier ressort sur l’a(i)sbl.
L’article 4, 27°, c) de la LAB du 18 septembre 2017 précise qui doit être considéré comme bénéficiaire effectif d’une ASBL et mentionne explicitement tous les membres du Conseil d’administration d’une ASBL. Ils doivent dès lors être identifiés et la vérification de leur identité doit se faire à l’aide de documents probants. 
Qu'est-ce qui est considéré comme un document probant ? 
Jusqu’à présent, le service de contrôle de la qualité demandait de conserver une copie de la carte d’identité. Ce document présente l’avantage de fournir la preuve que le membre s’est montré vigilant et cela le protège lors de la revue qualité. Dans le cadre d’une approche fondée sur les risques, telle que visée dans la loi du 18 septembre 2017, seule l’évaluation des risques du membre permettra de déterminer si un document destiné à vérifier l’identité du bénéficiaire effectif a force probante ou pas.


Si un client est classé à un niveau de risque faible à la suite d’une évaluation des risques, des mesures de vigilance simplifiées peuvent être appliquées. Mais dans le cas d’un niveau de risque élevé, des mesures de vigilance accrues devront être prises (voir article 19, alinéa 2 de la LAB). Les membres doivent en tout cas pouvoir prouver à l’Institut (en sa qualité d’autorité de contrôle compétente au sens de l’article 85 LAB) que les mesures de vigilance appliquées sont appropriées au vu des risques de blanchiment constatés.


En ce qui concerne le logiciel Admin-Consult que vous souhaitez implémenter, vous pouvez prévoir de définir les documents justificatifs en fonction de la nature du risque (élevé, standard ou faible) de vos clients. Exemples de documents en cas de risque faible : permis de conduire, attestation de résidence délivrée par la commune du domicile, copie de la feuille d’impôts, copie d’une facture d’électricité…
Les fonds de pension qui sont soumis au contrôle de la FMSA doivent-ils être identifiés à des fins de lutte contre le blanchiment ? Ou peuvent-ils bénéficier d’une exonération ?
La LAB du 18 septembre 2017 ne prévoit que deux exceptions à l’obligation d’identification : 
  • L’identification des bénéficiaires effectifs d’une société cotée en bourse (article 23, § 2 LAB) ;
  • Lorsque le professionnel évalue la situation juridique du client (article 33, § 2, article 34, § 4 et article 35, § 3 LAB).
Lors de l’évaluation des risques, une évaluation de « synthèse » intervient à la fin. Avons-nous également l’obligation de décrire, outre le caractère faible ou élevé du risque, pourquoi nous avons fait l’évaluation de la sorte ? Ou pouvons-nous ne pas compléter ce point ?
Cette partie doit également être complétée (voir point 5.2 Formulaire de synthèse d’évaluation des risques du client (page 34) : https://www.itaa.be/wp-content/uploads/itaa_recueil_de_mod%C3%A8les_de_formulaires.pdf)
Je souhaiterais avoir des informations concernant la procédure d’acceptation des clients (PAC) dans le cadre d’expertises judiciaires par des membres de l’ITAA.
Lors d’une expertise technique, nous partons du principe que nous devons suivre la PAC + établir une lettre de mission. Nous partons du principe que ce peut être une lettre de mission pour des missions uniques (missions à durée limitée).


Si vous exécutez une expertise technique à la demande d’une des parties, la PAC devra être suivie : identification / vérification / mesures de vigilance en fonction de l’évaluation des risques (faibles, standards ou élevés). Dans ce cas, une lettre de mission distincte, que vous pouvez moduler vous-même en fonction de la mission, est requise.
Si une expertise judiciaire est faite sur ordre du tribunal, est-il exact que la PAC ne doit pas être suivie ? Et que la lettre de mission ne doit pas être établie ?


Si l’expertise judiciaire est ordonnée par le tribunal, la lettre de mission n’est pas requise. Vous êtes désigné(e) par le biais du jugement qui décrit votre mission. Le « client », dans ce cas, est le SPF Justice ; celui-ci est suffisamment identifié par le jugement qui vous désigne comme expert et le risque est plutôt réduit.
Si un client potentiel présente une « carte d’identité » portant juste la mention de réfugié (sans pays d’origine). Cette carte peut être lue électroniquement. Cette personne peut-elle être acceptée comme client et faut-il prévoir un code supplémentaire dans le dossier global ?
La nationalité fait partie des éléments d’identification qui sont nécessaires à l’évaluation du risque de blanchiment. Sans cet élément, il est impossible d’évaluer le risque du client et, par conséquent, d’engager une relation d’affaires avec lui. Si le client peut prouver sa nationalité à l’aide d’un autre document, vous pouvez toutefois l’accepter sur la base de votre évaluation personnelle des risques.
I
Itaa est l'auteur de cet article de solution.

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